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  • Danièle Starenkyj

RELÂCHE ET CŒUR SUR LA NEIGE

Les enfants s’ennuyaient de chez grand-maman et grand-papa.

Après le magnifique voyage en famille à la capitale canadienne, le patinage sur le canal Rideau, la visite au musée de la Banque du Canada, la visite au musée de la monnaie, et la visite au musée de l’aviation et de l’espace du Canada, ils voulaient encore venir chez grand-maman et grand-papa, afin que la relâche soit, pour eux, totalement satisfaisante.

Ils se réjouissaient de jouer à cache-cache dans la grande maison familiale, de raconter à des oreilles attentives tout ce qu’ils avaient appris dans leurs visites muséales, et puis de respirer le grand air, de cligner des yeux dans la lumière éblouissante d’une neige intacte, de s’arrêter, ébahis, pour entendre le silence, de s’émerveiller d’un vaste espace sans obstacle – invitation à l’étirement, à l’élargissement, à l’évasement de la pensée enfin purgée de toute compétition et autocritique.

Et voilà qu’au milieu de tant de beauté, le sentiment non seulement d’être aimés, mais aussi d’aimer, leur donne … UNE IDÉE … Bientôt glacés, ils rentrent pour manger. Le visage illuminé d’une joie espiègle, ils nous invitent : « Grand-maman, grand-papa, venez, venez, on veut vous offrir un petit mot. » On se laisse entraîner vers la fenêtre et, surprise, en plein centre du grand champ juste en face de la maison, illuminé par un soleil d’or, nous contemplons un immense cœur tracé sur la neige, gros et grand comme leur amour pour nous, tout simple, tout vrai. Bisous, câlins, rires, larmes furtives. Tous émus, nous nous mettons à table pour partager un repas joyeux.

Puis c’est l’heure du coucher. Personne ne se fait prier. Les enfants courent enfiler le pyjama de « chez grand-maman » plié sous leur oreiller. Ils reviennent en riant fièrement : les pantalons leur arrivent maintenant à mi-mollet ! Impossible de le nier, en quelques mois, ils ont vraiment grandi ! Émus par le sentiment du temps qui passe mais que nous avons le privilège de savourer, nous leur souhaitons une bonne nuit et de beaux rêves. Il y a ainsi des moments où le bonheur est palpable.

De grands éducateurs affirment que l’intelligence des enfants se développe dans les jeux libres, les promenades dans la nature, les périodes d’ennui qui les forcent à inventer une activité 1. Mais je crois qu’il en est également ainsi pour L'AMOUR. Sans faire relâche des contraintes, des urgences, des obligations, des ambitions, des convoitises, l’amour risque de rester muet, et ce non-dit inflige aux meilleures relations une contraction paralysante. Alors, si la relâche c’était aussi pour dire que l’on aime, que l’on aime assez pour s’arrêter, pour se pencher, et pour inscrire sur la neige un immense cœur -- oh, pas tout à fait régulier -- mais aux battements robustes ?

Certes, un cœur qui aime et qui est aimé ne flanche pas facilement. Serait-ce pour cela que les gérontologues déclarent qu’être grand-parent favorise une longévité en BONNE SANTÉ et la prolonge de trois à quatre années ? Ils appellent cela très prosaïquement le « succès procréatif ». Plus simplement, mes enfants chéris, laissez-moi vous dire MERCI pour vos enfants chéris.

©2019 Danièle Starenkyj 1. Pasi Sahlberg, William Doyle, Let the Children Play – Why More Play Will Save Our Schools and Help Children Strive, Oxford University Press, 2019.

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