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  • Danièle Starenkyj

LEVURE DE BIÈRE, MÉLASSE, ET PETITE ROBE NOIRE

Mon père avait dans sa bibliothèque un livre dont la jaquette illustrée, alors que j’étais petite fille, m’intriguait. Je sondais, en gros plan, le visage grave, mais parfaitement dessiné, d’une jeune femme occupée à se nourrir très sérieusement avec un verre de jus frais dans une main et dans l’autre, une fourchette piquée dans un morceau de chou cru. Le message me semblait clair : aliments sains, beauté et harmonie allaient de pair. Je le regardais souvent. Et quand j’ai quitté la maison pour me marier, je l’ai emporté avec moi. C’est à l’âge de 19 ans que je l’ai finalement lu « Vivez jeune, Vivez longtemps ». Quelle révélation ! J’ai compris alors pourquoi mon père nous mettait toujours de la levure dans notre soupe, achetait du riz brun et du pain complet, et nous disait de ne pas sucer de bonbons.

J’ai, bien sûr, découvert l’auteur de ce livre : Gayelord Hauser (1895-1984), un nutritionniste américain d’origine allemande. Considéré comme un précurseur du mouvement d’alimentation saine, après avoir expérimenté les bienfaits d’une alimentation végétale qui l’avait guéri d’une tuberculose de la hanche, il est rapidement devenu célèbre auprès des actrices de Hollywood, des femmes riches et même de la royauté européenne, qui, toutes ne demandaient pas mieux que de rester jeunes et de vivre longtemps. Sa recette de santé, à la base, comportait toujours : de la levure de bière – aujourd’hui, on parle de levure nutritionnelle sans amertume mais avec la même richesse en vitamines du complexe B – de la mélasse – en anglais la « black », mais en français la verte, très riche en calcium et en fer très assimilable – et la petite robe noire. Pourquoi cette recommandation vestimentaire ? Pour le chic, l’élégance, le raffinement, et la modernité. Bien sûr, grâce à une alimentation équilibrée et non transformée, qui conserve ou redonne une silhouette svelte, la petite robe noire ne pouvait pas manquer de mettre en valeur un visage souriant et un corps souple peu importe l’âge.

C’était il y a 50 ans que je lisais ce livre. Il est toujours dans ma bibliothèque. Il a perdu sa jaquette et les quelques dernières pages de la table des matières. Il est jauni, légèrement écorné, et la reliure ne tient presque plus. Mais je ne le jetterai pas. Peut-être qu’un jour -- qui sait ? -- un de mes petits-enfants me le chipera, le lira – ne serait-ce qu’en diagonale – et, tout comme je le fis alors, il se consacrera à l’enseignement d’une nutrition pourvoyeuse de force. Un bon livre ne meurt pas, dit-on. En fait, son impact continue à tout simplement faire du bien, mais aussi à susciter des vocations et à initier des recherches qui peuvent changer la face du monde.

Oui, après en avoir donné à mes enfants, je continue à mettre de la levure dans ma soupe, à prendre de la mélasse verte en boisson chaude, et à porter des vêtements bien coupés, de style classique, et souvent noirs… Et, chemin faisant, à la suite de pionniers courageux, connus et inconnus, de divers guides alimentaires (L’Assiette Santé de Harvard et Le Guide alimentaire brésilien) nous voilà face à un nouveau Guide alimentaire canadien. Dites merci ! La route a été longue et souvent hérissée d’embûches, de sarcasmes, d’oppositions, mais au moins en matière d’alimentation, la vérité ne mérite-t-elle pas de commencer à triompher ?

© Danièle Starenkyj 2019.

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